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Ces deux séries
utilisent la technique du sténopé. Le mot vient du grec et
signifie " trou d'épingle ". La technique renvoie à la pratique
photographique des premiers temps : un contenant (dans mon cas, des boîtes
en carton) et pour seul objectif un trou du diamètre d'une épingle.
Ma rencontre avec la
technique du sténopé a coïncidé avec celle d'un
lieu, appelé Germoir. A l'époque, je hantais les lieux suspendus
comme les bâtiments militaires à l'abandon. Ces bâtisses
fin XIXe, si typiques de Bruxelles, à l'architecture lourde souvent
décriée me fascinaient à plus d'un titre. Leur masse
imposante évoquait d'abord l'image du château, et plus particulièrement
la haute et vieille demeure perdue dans la végétation folle,
oubliée des hommes et de leur activité fourmillante, image
forte qui m'habite continuellement depuis l'enfance. Ensuite me fascinait
le faste règne de la nature qui avait fini par reprendre ses droits
après la désertion humaine. Règne d'autant plus glorieux
qu'il s'étalait sur des années ... Mais cet univers fabuleux
à mes yeux perdait toute son ampleur dès que je tentais de
le capturer avec mon appareil photographique. Comment prétendre
saisir en un 1/500 de seconde l'âme d'un lieu où le temps
ne compte plus? Seul le sténopé a pu, il me semble, y parvenir
grâce à des temps de pose très longs (d'un jour à
trois semaines !). Le sténopé restitue la matière
agitée, la texture organique, transcende la pauvre utilité
perdue et révèle l' imperceptible : les habitants tortueux
des parterres de feuilles mortes, les ombres éteintes derrière
les fenêtres entr'ouvertes, et même la trajectoire hivernale
de l'astre solaire ...
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Les bains de Budapest. Lieu de visitation quotidienne, lieu de plaisir et de ressourcement. Sujet-sténopé que j'ai choisi de traiter avec un appareil quasi normal, pour des raisons techniques et de temps. L'humain, jusque là absent des sténopés, y fait surface entre deux flots, ombres dévorées par les brumes maîtresses. A force de fréquenter un lieu, on s'y accroche, on fait corps. Un lien affectif naît. Volonté de rendre au lieu sa dimension poétique, étrange. De dévier, tronquer, oublier l'utilité première. Je voudrais
chaleureusement remercier pour l' aide précieuse apportée
à l'élaboration de ce site : Tom Popper, Tania Decousser,
Jodi Greenberg et Hughes Reiter.
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